"Maouchouma relate un aspect de notre culture" (Liberation)
Le deuxième long-métrage de Lahcen Zinoun est presque en boite. Après cinq semaines de tournage dans la région de Lalla Takerkoust et le village d‘Ait Mizane, près d'Imlil, Zinoun s'est envolé pour l’Italie pour boucler la réalisation après le montage. Ce sont les moyens utilisés et les techniques mises en œuvre. Il a fallu donc se déplacer en Italie pour peaufiner l’œuvre d’autant que l'histoire du film, les lieux de tournage et les messages véhiculés demandent une certaine technique et beaucoup d'esthétique, un volet auquel Lahcen Zinoun tient beaucoup. Mais il n'y a pas que ces aspects car un autre problème continue de peser de tout son poids. Il s'agit du volet financier car le soutien du Fonds du CCM n'est pas en mesure de couvrir toutes les dépenses.
Pour un film dont le budget est estimé à 5 millions de DH, le CCM en a octroyé 3,5 millions de DH mais il fallait assurer la différence par d'autres moyens. Le film raconte l'histoire de la poétesse amazighe Mririda Nait Aâtik qui avait défrayé la chronique au début du siècle dernier par sa poésie, son caractère rebelle et sa tendance à l'émancipation. Mais c'est plutôt la mémoire, la relation avec le corps et la beauté, le pouvoir et l'identité, d'une façon générale, qui sont mis en exergue dans ce film.
Son nom "Al Maouchouma" (La tatouée) est significatif, ce qui en dit long sur sa teneur symbolique. En effet, il fut un temps où le tatouage représentait pour les femmes des fonctions essentielles, car de la même manière qu'il présentait un aspect esthétique et protégeait le corps, il était censé favoriser la fertilité de la femme, d'où la charge symbolique de l'histoire.
Et pour bien cerner la question, une recherche a été faite à l'Institut Royal de la culture amazighe et à la Bibliothèque nationale par Mohamed Soukri, pour dépoussiérer ce pan de la mémoire collective et du patrimoine culturel. Pour interpréter les personnages du film, le réalisateur a fait appel, entre autres, à Ismail Aboulkanater, Fatima Zahra Iyachi, Abdellatif Chawki, Mohamed Choubi, Abdelkebir Cheddadi, Jihane Kamal et Omar Sayed. Pour Mohamed Soukri, coauteur et critique de cinéma, le thème du film mérite d'être traité du fait qu'il évoque un aspect important de notre culture, à savoir le tatouage qui n'a pas eu l'intérêt qu'il mérite de la part des intellectuels en général et des cinéastes en particulier.
Pourtant, explique Soukri, le tatouage avait la même importance que les motifs et dessins appliqués dans la tapisserie et autres objets d'artisanat.
Lahcen Zinoun abonde dans le même sens et explique: "D’aucuns pensent que le tatouage n'est plus pratiqué alors qu'il l'est toujours dans certaines régions. C'est plus que des dessins sur le corps, il véhicule beaucoup de significations".
Quant au choix du personnage de Mririda Nait Aâtik, il souligne que "le choix vient du fait que beaucoup de gens renient l'existence de cette poétesse et chanteuse belle, rebelle et révoltée". La sortie du film est prévue pour le début de l'année prochaine.