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« Il y a une explosion cinématographique au Maroc » (Afrik.com)

Entretien avec un membre du jury de la 9ème édition du Festival international du film de Marrakech

Lahcen Zinoun, c’est d’abord la danse. Il commence sa carrière au Ballet Royal de Wallonie où il brillera de 1963 à 1974. Puis il décide de rentrer au Maroc et de se battre pour faire connaitre cet art difficilement accepté. Il ouvre une école et crée le Festival de danse de Casablanca. Mais Lahcen Zinoun c’est aussi le cinéma. Chorégraphe de plusieurs films dont La Dernière tentation du Christ de Martin Scorsese et Un thé au Sahara de Bernardo Bertolucci, il se décide enfin à passer derrière la caméra. Il réalise trois courts métrages, Assamt (2001), Piano (2002), et Faux-pas (2003). On lui doit également La Beauté Eparpillée, son premier long métrage sorti en 2007. Il nous a accordé un entretien sur le cinéma au Maroc.

Afrik.com : Quelle est la particularité du Festival International du Film de Marrakech ?

Lahcen Zinoun : En tant que citoyen marocain, je suis fier de ce festival. Il fait actuellement partie des grands festivals mondiaux par la qualité de sa programmation, par son organisation et la position politique de Sa Majesté (le roi Mohamed VI) qui pousse le cinéma vers le haut au Maroc. La qualité d’un tel événement se vérifie surtout avec le public. Je n’ai jamais vu dans d’autres festivals une salle de cinéma pleine à 10h le matin. Venez à n’importe quelle heure et vous constaterez.

Afrik.com : Le cinéma marocain est riche. Pourtant il reste peu connu…

Lahcen Zinoun : Oui, mais ça va venir petit à petit. Bien évidemment, c’est presque un viol de vouloir intégrer le réseau international. Mais ça viendra. Dernièrement j’ai été au festival du Cinéma méditerranéen de Rome. Je suis fier de souligner que le Maroc a envoyé toute une délégation pour y participer, à ses frais. Le Maroc veut promouvoir son cinéma et ses artistes. Le cinéma marocain est très jeune. Il y a peu de temps, on produisait un film par an ou tous les deux ans. Actuellement on est entre quinze et vingt films par an ! Et une centaine de courts métrage chaque année. Il y a une explosion cinématographique au Maroc. Et notre richesse, c’est de ne pas avoir une école ou un style marocain. Non, il y a plusieurs cinéastes et chacun a sa vision.

Afrik.com : Il n’existe pas au Maroc, comme dans toute l’Afrique un vrai réseau de distribution des films. Vous, en tant que réalisateur marocain, avez-vous connu ou connaissez-vous des difficultés dans la diffusion de vos réalisations ?

Lahcen Zinoun : Oui ! En tout et pour tout j’ai réalisé un seul long métrage. Et j’ai eu énormément de difficultés ! Pourtant j’ai eu le soutien de l’avance sur recettes au Maroc. J’ai eu un problème avec un co-producteur en France qui a pris l’argent de la Francophonie et a fui en Inde. Il a fallu que je paye de ma poche pour pouvoir terminer mon film. Donc je me suis contenté de le distribuer seulement au Maroc où il a bien marché. Sinon, à travers le monde, j’ai pu le faire découvrir grâce à des festivals. C’est la seule satisfaction que j’ai. Mais j’attends les propositions de télévisions pour, peut-être, m’acheter le film par la suite.

Afrik.com : Vous avez commencé votre carrière professionnelle par la danse. Maintenant le cinéma. Comment on arrive de l’un à l’autre ?

Lahcen Zinoun : Depuis tout petit, je rêve de faire du cinéma. Dans mes créations de danse j’ai toujours mis en scène des images filmiques. Le cinéma à la base était muet. L’image qui parlait c’était le mouvement, le rythme. La danse est muette. C’est le corps qui parle avec le mouvement et le rythme. C’est presque la même chose au final.

Afrik.com : En Afrique, ce corps est important. Vous vous en servez beaucoup dans votre cinéma ?

Lahcen Zinoun : Malheureusement nous avons un problème avec le corps au Maroc. Les pays arabes ont un problème avec le corps. Ce n’est pas la danse qui dérange mais le corps. Il est tabou. Et je crois que nous avons intérêt à nous réconcilier avec ça.

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